Un projet « Art et Science » : une création théâtrale autour des récifs coralliens
Qui ?
Porteur de l’initiative
Théâtre des Alberts
Partenaires
IRD La Réunion, Direction des Affaires Culturelles, Conseil Régional, Conseil Départemental, Territoire de la Côte Ouest, Commune de Saint-Paul
Quand ?
Date de création
2022
Durée
2 ans
Où ?
Lieu d’implantation
La Réunion
Aire d’action
Le Séchoir (Piton St Leu), Kélonia (St Leu), Case de Barrage (St Paul) et La Cité des Arts (St Denis), Pôle culturel de Chirongui, Mayotte, Mahajanga, Madagascar, 104 et Palais de la Porte Dorée, Paris







L’essentiel pour s’inspirer
Pourquoi ?
Sur l’île de La Réunion, les récifs coralliens (qui abritent 30% de la biodiversité marine) sont mis en péril. Les messages d’urgence émis par les scientifiques se multiplient mais ne permettent pas de faire bouger les lignes suffisamment rapidement. Pascale Chabanet, directrice de recherche à l’IRD La Réunion et spécialiste en écologie des poissons récifaux, en est consciente. C’est pour cette raison qu’elle commence à échanger dès 2022 avec l’artiste visuelle, photographe aquatique et réalisatrice Aline Escalon et les metteurs en scène Vincent Legrand, directeur artistique du Théâtre des Alberts, et Eric Domenicone, co-responsable artistique de la SoupeCie, sur un projet « Art et Science » autour des récifs coralliens. Car pour mettre en place des solutions trouvées dans les laboratoires scientifiques et avoir un impact positif, il lui apparaît incontournable d’impliquer la société dans les projets scientifiques… et « quel meilleur véhicule que l’art pour le faire ! » affirme-t-elle.
Comment ?
À l’initiative de l’IRD, l’aventure du spectacle RÉCIF, 26ème création du Théâtre des Alberts, commence en 2022 par un « prologue à la création ». Plusieurs résidences d’écriture sont ponctuées d’échanges avec les scientifiques sur les enjeux auxquels les récifs coralliens sont confrontés (réchauffement climatique, pollution, perte de biodiversité) et leurs conséquences sur les sociétés humaines (montée des eaux, migrations, aléas climatiques). Les trois comédiens découvrent le fonctionnement de ces organismes vivants, leur grande diversité, leur beauté et s’en émerveillent. « Il est rare que dans la préparation d’un spectacle, il y ait autant de consultants, d’aide pour comprendre un sujet.» – Vincent Legrand, directeur artistique du Théâtre des Alberts et comédien-marionnettiste.
Après cette phase de montée en connaissance en étroite collaboration avec les scientifiques de l’IRD, place à la vision artistique, théâtralisée. Car si la science n’est pas une spécialité du Théâtre des Alberts, les collaborations artistiques (mise en scène, musique, scénographie, techniques marionnettiques, vidéo..) sont au fondement de son identité créative. La singularité du théâtre de marionnettes qui fait appel à des outils artistiques peu communs (échelles, ombres, silhouettes et formes de narrations) n’en est que renforcée. Durant l’année 2023, le travail préparatoire d’écriture fait appel à des techniques et des sensibilités différentes, laissant une place centrale à l’exploration collective, artistique et scientifique.
Au cœur de ce projet « Art et Science », la question de la tonalité du propos. Faut-il dénoncer ? Encourager à mieux préserver ? Inquiéter ? En découvrant la beauté et la complexité des récifs coralliens, les trois comédiens décident de partager leur fascination, convaincus que « si on est émerveillés par quelque chose, on a davantage envie d’en prendre soin ». Cette fascination devient le fil rouge des spectacles RÉCIF et KARANG. Ce deuxième spectacle KARANG est la forme légère de RÉCIF, le support vidéo a été remplacé par le support photographique, ce qui permet une diffusion plus facile. En compagnie d’une marionnette, ils tentent à leur tour avec poésie et humour de faire comprendre ce qu’est le corail et de raconter au public (dès 6 ans) son fonctionnement, ses interactions avec les humains, les menaces qui pèsent sur lui et l’espoir des solutions. Les spectacles se concluent par une discussion avec le public, les artistes et les scientifiques.
Les spectacles se produisent aujourd’hui et sont diffusés auprès d’une grande diversité de publics : au festival de la francophonie début octobre 2024, au Centquatre (Paris), au Palais de la porte dorée… Des productions sont aussi prévues à La Réunion, à Mayotte et à Madagascar, à l’occasion de divers événements, afin de mutualiser les modes de diffusion scientifiques à ceux du spectacle vivant. Par ailleurs, Le Théâtre des Alberts travaille aujourd’hui sur de nouveaux projets en associant le service de l’environnement et le service culture de la commune de Saint-Paul.
Impact ?
« Plusieurs personnes nous ont dit qu’ils ne savaient pas que les coraux étaient si en danger, que c’était si dramatique, et qu’ils apprenaient quelque chose. On a eu le répondant du public qui disait : on allait au lagon comme d’habitude, on ne savait pas qu’il y avait ce danger » – Vincent Legrand.
L’approche artistique et immersive du théâtre a favorisé une transmission accessible et émotionnelle des enjeux environnementaux, ce qui a permis de sensibiliser en premier lieu les enfants, mais aussi leurs parents qui sont souvent peu familiers avec la mer et son écosystème. À la Réunion, il y a eu une mobilisation croissante des jeunes, notamment des adolescents, qui rejoignent des associations locales pour des actions concrètes comme les collectes de déchets ou la sensibilisation communautaire par exemple. La Réunion s’ouvre de plus en plus sur la mer, et de nombreuses initiatives émergent pour la découverte et la préservation de la biodiversité marine. En intégrant des visuels à travers les vidéos ou photos, les projets RÉCIF et KARANG ont renforcé la portée du spectacle, en favorisant une meilleure compréhension de cette thématique scientifique complexe.
L’extra pour se mettre en action
Sur le chemin…
Les artistes et les scientifiques impliqués dans le projet ont d’abord rencontré des difficultés à communiquer, ne partageant pas le même langage. Cependant, la rencontre entre une scientifique et un ou plusieurs artistes s’est révélée essentielle pour approfondir la thématique sensible des enjeux maritimes. Il était essentiel d’organiser un travail collectif afin d’approfondir les thématiques majeures liées à la mer et sa biodiversité. Cette collaboration ne se limite pas aux scientifiques : les artistes ont également dû travailler avec les acteurs politiques, une démarche qui s’est avérée relativement pertinente.
Par ailleurs, c’est la passion pour les arts de la marionnette et l’idée un peu audacieuse de créer un spectacle éducatif mettant en scène une marionnette apnéiste qui ont permis de toucher le public de manière originale et sensible. Le Théâtre reste libre dans ses choix artistiques vis-à-vis de l’État. Toutefois, à l’échelle régionale, il a pu établir une collaboration inédite avec la Direction Régionale Océan Indien, qui s’est impliquée de manière significative dans le projet. Leur venue au village en octobre, à l’occasion du festival de la Francophonie, a d’ailleurs été soutenue et financée en partie par la région. Enfin, un lien fort s’est tissé avec la commune de Saint-Paul, où la compagnie a vu le jour. Les élus locaux ont manifesté une réelle sensibilité à la question de la biodiversité locale, renforçant ainsi leur engagement auprès du projet. « La culture joue un rôle essentiel dans cette transmission de savoirs : elle vulgarise des notions importantes de notre existence et sensibilise au respect de l’environnement » – Suzelle BOUCHER, adjointe au maire de Saint-Paul et déléguée aux affaires culturelles à la conservation et à la valorisation du patrimoine culturel matériel et immatériel.
Le regard de La fabrique des récits
Et si nous faisions de la connaissance des dangers pesant sur les écosystèmes un bagage commun essentiel ?
La création de connaissance doit être basée sur la science et se doter d’une approche artistique et sensible pour que nous ne puissions plus ignorer la dégradation des écosystèmes et ses causes.
Autres initiatives
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Zone sensible
Un centre de production d’art et de nourriture ouvert sur son quartier et ses habitants.
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Re-découverte du ruisseau Caravelle-Aygalades
Des ateliers artistiques pour re-découvrir un ruisseau à l’abandon.
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Sur le sentier des Lauzes
Un projet collectif où les habitants font appel à des artistes pour penser l’avenir de leur territoire.