Un processus de redécouverte des fleuves par la mémoire des habitants de leurs rives
Qui ?
Porteur de l’initiative
Eau et Rivières de Bretagne
Partenaires
Région Bretagne, Assemblée Permanente des Présidents de Commissions locales de l’eau de Bretagne (APPCB), Office Français de la Biodiversité (OFB), Coopérative Cuesta
Quand ?
Date de création
2021
Durée
En cours
Où ?
Lieu d’implantation
Quimper
Aire d’action
Région Bretagne






L’essentiel pour s’inspirer
Pourquoi ?
En 2021, sur les bords du Bélon, est initiée une démarche originale, fruit d’une rencontre entre l’association Eau et Rivières de Bretagne et la Région Bretagne. La première cherche de nouveaux leviers de mobilisation citoyenne et, dans le cadre de ses actions, souhaite renouer avec une approche sensible du milieu naturel. La seconde cherche à diversifier son approche de la gestion des cours d’eau et à en pérenniser la préservation au-delà des indicateurs techniques. Ainsi, le fleuve fait l’objet d’une expérimentation pilote : un Atlas socio-culturel.
La démarche est bientôt étendue sur le territoire à travers un appel à projet régional lancé en 2022, qui donne lieu à quatre nouvelles initiatives, notamment l’Atlas du Léguer et l’Atlas du Lapic. Chaque fleuve, par son emplacement et ses caractéristiques, nécessite l’implication d’acteurs différents. Du côté du fleuve du Lapic, l’Établissement Public d’Aménagement et de Gestion de la Baie de Douarnenez (EPAB), émanation de la Commission Locale de l’Eau (CLE), s’empare du sujet. Dans le cadre d’actions de maintien et restauration de la qualité de l’eau en cours depuis 2012, dans un contexte compliqué par la question de la fuite d’azote qui cause la prolifération d’algues vertes sur le littoral, l’établissement estime au cours de son deuxième mandat qu’il est nécessaire de mettre à contribution les parties prenantes qui, le long des fleuves se jetant dans la baie, ont un rôle à jouer dans la qualité de leur eau : agriculteurs, collectivités, habitants. L’important : remettre du sens et « amener chacun à considérer que l’eau est un bien commun essentiel » (Gaëlle Vigouroux, vice-présidente de l’EPAB). Un constat d’autant plus complexe à faire émerger dans le cas de fleuves comme le Lapic, dont les rives privatisées et/ou inaccessibles empêchent la découverte et la (re)connaissance.
Comment ?
Les atlas socio-culturel ont pour intention de valoriser un fleuve auprès de tous les occupants de ses rives, de manière sensible et en mobilisant la mémoire et les attachements, tout cela matérialisé par un site internet recensant cartes, histoires et créations artistiques. Ils ont tous en commun le souhait de fédérer des acteurs variés, de mutualiser des connaissances et des expériences et de faire émerger des outils collaboratifs pour retisser des liens avec les fleuves. On retrouve dans chacun des processus des éléments communs de méthode : les causeries (rencontres, récoltes de témoignages, partage de savoirs et d’histoires de la rivière) ; les traversées (parcours à pied, à vélo, en paddle, en français ou en breton, pour explorer collectivement la rivière de la source à la mer, partir à la recherche de ses richesses, retisser des liens) ; la cartographie (les richesses du territoire sont mises sur des cartes pour être partagées : paysages, bâtisses, sons, souvenirs…).
Les contributeurs sont multiples : habitants et habitantes des rives des fleuves, mais aussi des associations locales, des usagers de la rivière, des représentants du monde culturel et environnemental et des artistes. Ces derniers sont là pour écouter, interpréter et proposer de nouvelles représentations artistiques du fleuve concerné. À travers des ateliers d’écritures proposés aux habitants, Michel Suzzarini, auteur, a créé douze “parcours écrits”, dans lesquels la rivière du Lapic parle à la première personne, à partir des témoignages récoltés. Ces écrits, à la fois poétiques et ancrés dans une réalité vécue, sont une manière, dans les mots de l’auteur, de « rendre visible à nos yeux, mais aussi à nos cœurs » la rivière, pour espérer créer une prise de conscience et donc un mouvement favorable à sa préservation.
L’approche culturelle, selon Gaëlle Vigouroux, permet d’élargir la focale et d’amener autour de la table une multiplicité d’acteurs mus par divers intérêts. La collaboration avec des structures locales de la ville de Plonévez-Porzay – associations, collectifs de randonnée, chorale, club de loisirs créatifs, bibliothèque – a permis de réunir aux premières réunions concernant l’Atlas du Lapic une vingtaine de personnes pour élaborer une frise du Lapic constituée de leurs souvenirs. L’occasion de susciter ou raviver l’intérêt des participants pour la rivière.
Impact ?
De ces processus d’échanges et de découverte naissent des sites interactifs qui proposent des boucles d’exploration, des cartes interactives avec points d’intérêts recensés par les habitants, des informations sur les actualités pour mobiliser la communauté. Dans le cas du Bélon, des représentations imaginées par des artistes pour proposer une lecture sensible des lieux sous forme de poèmes ou de photos sont aussi proposées. Sur le site de l’Atlas du Lapic, on trouvera une carte littéraire, fruit des ateliers d’écriture et d’expression libre, qui recensera des mots, citations, réflexions, phrases, déposés par les habitants. Des sites ayant vocation à être nourris en continu par les habitants, qui peuvent y déposer leurs contributions et faire vivre ces représentations collectives de la rivière comme commun.
Si le livrable est important, la démarche en elle-même aura eu son impact. Sur le Lapic, lors des “traversées” organisées, les techniciens travaillant pour le compte du Comité de Bassin à la restauration des continuités écologiques ont pu expliquer leurs actions de reméandrement, donnant ainsi du sens à des choix d’action publique reposant sur une compréhension globale des écosystèmes que le grand public n’a pas. Ces actions de sensibilisation ont suscité un grand intérêt chez les participants.
L’extra pour se mettre en action
Sur le chemin…
Les projets comme le Bélon et le Léguer ont bénéficié de l’ancrage local et du dynamisme des communautés déjà actives sur leurs rives. Il est néanmoins essentiel de faire vivre ces communautés et leur implication, de faire perdurer l’engagement des personnes dans le temps, de renforcer l’investissement des artistes, de questionner les outils utilisés…
Côté Lapic, l’EPAB, dont le mandat se renouvelle tous les 6 ans, souhaite que les communes concernées s’emparent à présent de la dynamique qui a été lancée pour la faire vivre. Un enjeu de passation incertain au vu des financements limités et du temps contraint des élus et agents. Néanmoins, la commune de Plonévez-Porzay a su accompagner la démarche, notamment en ouvrant des espaces sur les rives du Lapic pour que les habitants se les réapproprient.
Le regard de La fabrique des récits
Et si nous (re)créions un patrimoine commun à partir de l’environnement naturel que nous partageons ?
En activant notre mémoire des choses et des lieux, il devient possible de lier passé, présent et futur, humain et non-humain, usage et préservation.
Autres initiatives
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Agis dans ton lieu
Un pôle territorial d’industries culturelles et créatives pour mettre en lien aménageurs, artistes et habitants.
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Les Atlas socio-culturels des rivières de Bretagne
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Les jardins culturels de Bécherel
Un mouvement de décloisonnement des espaces extérieurs au service de la création et du commun.