S’entraîner sans traîner

Pourquoi ?

Près de 45% du territoire de la ville de Lanester est agricole. La ville est soucieuse de prendre les bonnes décisions d’aménagement pour s’inscrire dans l’objectif de « zéro artificialisation nette des sols » à horizon 2050. Mais, construite sur d’anciens marais, elle est également menacée par les risques de submersion marine liés à l’urgence climatique. Confrontée à des choix d’aménagement complexes – densification du cœur de ville tout en préservant son « étanchéité » face aux risques de submersion -, elle décide de se mettre en mouvement et d’engager sa population dans le défi des transitions.

Pour clarifier leur feuille de route, les services techniques de la ville missionnent le cabinet d’urbanisme Particules, qui s’associe à la Coopérative d’Urbanisme Culturel Cuesta. L’objectif : mener une étude de définition urbaine participative pour éclairer les choix d’aménagement de la ville. Mais aussi et surtout, faire vivre cette étude « hors des murs de l’hôtel de ville » et embarquer les habitants, en leur donnant envie et courage de se fédérer autour des enjeux écologiques et sociaux. La démarche « S’entraîner sans traîner » voit le jour. Elle s’est divisée en 3 phases entre 2022 et 2023.

Comment ?

La première phase se déroule de janvier à mai 2022. Elle prend la forme d’une grande enquête menée auprès des habitants de Lanester, afin d’identifier les vécus du territoire, mais aussi les besoins, les envies et les enjeux (arpentages en petit groupe, grandes marches exploratoires de la ville – à pied ou en vélo, formulaires grand public). Aménagement, cadre de vie, loisirs, mobilité, jeunesse, environnement, habitat… les thématiques explorées sont nombreuses. Les résultats sont ensuite synthétisés et les axes structurants du projet urbain sont présentés lors d’une Assemblée citoyenne. Une réunion publique est ensuite repensée grâce à une expérience de danse ouverte à tous. La chorégraphe Raphaëlle Delaunay crée « un hakka lanestérien à faire ensemble à chaque coup dur et victoire collective, au conseil municipal comme aux rentrées scolaires ». Cette chorégraphie est transmise aux habitants et dansée collectivement (agents publiques et citoyens) lors de la remise de l’étude.

La seconde phase se déroule de mai à novembre 2022. Un atelier inter-services mené par les agents des différents services de la ville permet de recenser les initiatives en cours et à venir dans la ville. Ces éléments donnent le jour à 6 récits prospectifs de territoire pour se projeter vers des futurs possibles – Lanester aux enfants ; Lanester des marées et des marais ; Lanester, ville – village ; Lanest’air, la ville des sens ; Lanester nourricière et Lanester post carbone. Des débats autour de ces récits sont ensuite organisés pour recueillir de la matière en faisant réagir les citoyens et les élus. La danse comme fil conducteur de ces échanges est transmise et diffusée dans plusieurs endroits de la ville, et devient un nouvel outil qui permet de toucher un public varié (école de musique et de danse, scolaires et périscolaires, citoyens, agents publics) et de parler des enjeux de transition.

Enfin, la troisième phase se déroule de novembre 2022 à avril 2023. En réaction aux six récits de territoire, des initiatives sont lancées, les actions sont documentées. Cette phase se finalise par un rendu de l’étude, avec des recommandations d’aménagement de Lanester à court et moyen terme soumises au vote des habitants lors d’un événement final. Lors de cette journée, tous les Lanesteriens dansent ensemble leur danse collective.

Impact ?

« Cela a créé pas mal d’attente auprès des habitants : ils se sont projetés dans des imaginaires qui pouvaient être positifs malgré des renoncements à faire » – Fabienne Boudon, architecte et urbaniste chez Particules.

Aujourd’hui, les récits de Lanester ont une véritable portée pédagogique, d’acculturation et de décloisonnement. Largement diffusés, ils ont transformé la perception de la ville par ses habitants et les ont mis en mouvement grâce à l’émotion et à la danse qui incarne physiquement cette démarche de transition. Ils ont donné lieu à de nouvelles façons de coopérer entre les agents du service public de la ville qui se sont projetés dans le futur de leurs métiers. Ils ont également permis d’ouvrir le débat et d’aligner les élus sur une vision moins anthropique de l’aménagement.